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Avant-Propos

A - Un monde, des perceptions

Depuis les premières cités antiques jusqu'à la civilisation moderne, toutes nos sociétés se sont construites autour de nos croyances, qu'elles soient religieuses ou idéologiques. C'est en adhérant à des mythes, des idéaux et des concepts communs que nous avons pu structurer le tissu social nécessaire à la cohabitation de milliers, de millions, puis de milliards d'individus.(1)

 

C'est à travers des idéaux et des concepts que se traduisent aussi de nombreux conflits humains. Que nos intérêts soient légitimes ou cupides, que ce soit par calcul ou en toute bonne foi, nous avons tendance à rationaliser nos actions en les justifiant au nom de croyances. Combien sont morts pour des idées, combien ont tué au nom d'idéaux, de religions ou au nom d'une certaine conception du monde ? Au nom de quoi tant d'humains tentent-ils de soumettre les autres ? Combien de vaines obstinations, combien de conflits, combien de génocides seraient évités si on parvenait à s'accorder plus souvent, ou simplement à admettre la valeur des différentes croyances et opinions ? 

« Ce sont les perceptions qui régissent l'univers. »

Frank Herbert, écrivain

Tout au long de l'essor industriel des deux siècles derniers, les sociétés humaines dominantes ont érigé l'individu humain comme valeur sacrée et développé leur science et leur technique en vue de l'instrumentalisation du monde physique* à des fins productives. Aujourd'hui les niveaux de technologie, d'exploitation de l'environnement et de l'humain par lui-même sont tels que l'humanité met en péril l'écosystème à travers le réchauffement climatique, ainsi que l'extinction massive du vivant. Il y a plus de 40 ans que les scientifiques alertent régulièrement nos sociétés*, et les réactions collectives sont très loin d'être à la mesure des enjeux ; au contraire, emportées dans leur élan productiviste nos sociétés n'ont cessé de consommer de plus en plus de ressources, elles sont ahuries et accélèrent vers l'impasse annoncée.

 

Alors qu'on parvient généralement bien à cerner sur quoi portent les divergences, peu de monde semble questionner les logiques et le sens qui sous-tendent les différentes mentalités et croyances. Nombreux sont les gens qui pensent que ceux qui ont un avis différent du leur sont myopes, abrutis, insensibles, ou immoraux. C'est un fait dramatique, car celui qui perçoit différemment est alors considéré comme un danger dont il faut se préserver, un malade à guérir, un ignare à éduquer, ou pire, un hérétique à éliminer.

 

L'incapacité des sociétés humaines à se mettre d'accord et à agir de concert n'est pas un problème technique qui pourrait être résolu par davantage de technologie. Être en quête de vérité, c'est non seulement chercher à comprendre comment le monde est fait (ce qui se manifeste), mais aussi s’intéresser à la façon dont on le comprend et dont on se le figure, (ce qui est perçu) c’est-à-dire s'intéresser à l’origine des différences d’interprétations et de croyances, qui sont à la fois source de bien des richesses et de bien des problèmes. 

 

En développant les sciences de la perception, on peut mieux évaluer et équilibrer nos compréhensions, en harmonisant l'univers externe de la réalité physique et l'univers interne de la réalité psychique. En effet, face aux défis auxquels l'humanité s'est contrainte, la seule connaissance du monde physique extérieur ne suffit pas. Les sociétés sont faites d'individus, les enjeux collectifs sont liés aux enjeux individuels. Pour comprendre le monde que nous avons façonné, pour choisir de façon éclairée dans quelle société nous voulons vivre demain, pour être capable d'accorder nos actions, il est essentiel de comprendre les structures de nos représentations du monde, qui sont indissociables de nos motivations individuelles. Autrement dit, l'humain doit mieux comprendre ses perceptions, pour se connaître lui-même, de l'intérieur.

« Connais-toi toi-même et tu connaîtras l'univers et les dieux. »

Maxime delphique

En réalisant que nos différentes perceptions du monde reflètent toutes des facettes de la réalité, nous pourrons mieux les utiliser comme des complémentarités objectives et non plus comme des convictions inconciliables ou des prétextes à des conflits insolubles.

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